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« Quand ce sont les friches qu’on occupe, quand ce sont dans les marges que nos vies se déploient, ce n’est pas seulement le temps qui efface nos traces. Ce sont les pelleteuses de la ville, le feu parfois, les projets immobiliers pour citadins modèles souvent, ou les lieux culturels et artistiques aux bottes de la municipalité qui lissent et ouvrent le passage à la gentrification. Mais c’est surtout sous le discours officiel -qui, autant que l’oubli, ronge lentement les histoires foisonnantes de nos lieux de lutte- que nos traces disparaissent. Pour les médias, la municipalité, le gouvernement, soit nous n’existons pas, soit nous sommes un tas de marginaux, étiquetable en une courte phrase dans les pages du journal local. Pour cela, écrire nous-mêmes l’histoire du Quartier Libre des Lentillères, c’est une des manières de ne pas se laisser déposséder par l’histoire officielle. Parfois, la multitude et la diversité de ce lieu collectif bariolé où se mêlent poésie de la récup et revendications politiques radicales rendent difficile le choix des mots. La crainte d’un discours unique et monolithique l’emporte sur le besoin de laisser une trace. C’est là que les témoignages aident, en faisant émerger non pas une parole unique qui se ferait vérité, mais des anecdotes, une ambiance, des préoccupations partagées, ou refoulées, des frustrations, des doutes, des regrets, qui n’ont pas toujours leur place dans nos tracts ou nos communiqués. Esquisser ainsi, derrière ces récits personnels multiples, des entrelacs, devenus nœud indémêlable qui tracent une histoire à la hauteur de ce qui se vit ici. Ces histoires des Lentillères, nous voulons qu’elles se dessinent maintenant, pas au hasard d’une soirée de retrouvailles en petit comité dans 10 ans. Maintenant, pendant que nos souvenirs sont encore frais. Maintenant, tant qu’il est possible de peser dans la balance de ceux qui aimeraient décider pour nous. Maintenant qu’il est encore temps de partager avec de nouvelles personnes la puissance de ce qui se vit sur ces terres. Maintenant, pour pouvoir entretenir un imaginaire collectif de résistance contre ce monde qui pousse à l’individualisme et à l’obsession matérielle, au détriment de l’enrichissement par le partage. Maintenant que le réel fait force de preuve et que nous pouvons encore faire contagion. Maintenant, pour qu’au sein des Lentillères, notre pensée stratégique puisse se construire et s’enrichir du point de vue des autres jardinier-e-s et habitant-e-s. En racontant ce qu’il y avait avant, on se rend compte que les histoires sont liées. Que ce sont les amitiés qui les tissent, comme celle que nous construisons depuis plusieurs années avec Jean-Pierre et Christine, les maraîchers du Pré Velot. Dans le numéro 4 de Quartier Libre, illes nous racontent l’histoire du quartier d’avant l’occupation : lorsque les arbres aux Lentillères se comptaient sur les doigts de la main, que le voisin organisait des boums payantes dans sa cave pour les enfants du collège, et que les moutons sur une parcelle, le round up sur l’autre, étaient là pour contrôler la végétation dès qu’elle se faisait trop dense… Illes nous rappellent aussi les balbutiements du Quartier Libre lorsque, à nos côtés, pour l’occupation de la toute première parcelle des Lentillères, nous occupions les terres sans être conscient-e-s de la richesse qu’elles nous promettaient… »