Lettre ouverte des Lentillères en ces temps électoraux (et viraux…)

Nous avions écrit ce texte il y a plusieurs jours, dans le but de le publier au cours de cette journée électorale. L’ampleur prise par le coronovirus semble mettre les élections à distance de l’actualité. Malgré tout et puisque le premier tour a bien eu lieu, nous vous invitons à lire, commenter et débattre les quelques reflexions suivantes pendant le confinement qui s’annonce. 
Aussi puisque le sujet est brûlant et qu’il est toujours bon dans des moments comme celui-ci de consulter des analyses plus structurelles, nous vous proposons également la lecture de l’article suivant qui fait le lien entre agro-industrie et coronavirus

Nous suivons depuis 10 ans notre propre calendrier, celui des saisons et des cycles de la nature, celui des luttes, de nos assemblées, des mouvements qui nous traversent, des rencontres, de la construction de nos amitiés et de nos soutiens.Et même s’il tente de s’imposer au monde politique, le calendrier électoral n’est pas le notre. Bien sûr nous n’y sommes pas complètement indifférent·es, car si nous luttons pour disperser le pouvoir, nous ne sommes pas dupes, celui-ci n’a pas disparu et les élections viendront donc couronner une nouvelle fois qui dirigera la ville. Les répercussions peuvent être nombreuses aussi bien pour les Lentillères que pour l’ensemble des habitant·es de la ville.


Ainsi dans le cadre de cette campagne électorale, les idées et les pratiques politiques de milliers de gens se sont vues ordonnées dans des programmes. Du moins celles qui sont devenues acceptables aux yeux des candidats, quand d’autres restent ignorées.


Aux Lentillères, dix ans de lutte ont finit par provoquer tellement de sympathie et de soutien au sein des dijonnais·es que tous les partis se sont rendus compte que l’abandon du projet semblait un filon électoral intéressant. D’autant plus depuis que le verdissement de programme est devenu la discipline la plus en vogue des élections.


Dépassés par les enjeux climatiques actuels, les mobilisations des jeunes, un été caniculaire, et la prise de conscience généralisée, politiciens de tout bord tentent, à l’heure de se faire (ré?-)élire, de s’accrocher à la bouée de sauvetage écologique. Mais comment pourrions-nous faire confiance à ceux qui ont permis au désastre écologique de se mettre en place ? Comment ceux-là mêmes qui gouvernent depuis des lustres pourraient-ils devenir du jour au lendemain les artisans de l’écologie ?


Depuis longtemps, des gens se sont mis en lutte aux Lentillères, à Bure, à Europacity, à Roybon, à Notre-dame des Landes, à Poligny, mais aussi à l’autre bout du monde, au Chili comme au Rojava. À chaque fois, les opportunistes de la politique espèrent retirer un profit de nos luttes en se les appropriant lorsque le vent tourne, tout en les vidant de leurs contenus les plus subversifs.
L’histoire des luttes nous apprend à nous méfier des amitiés offertes à la veille d’une victoire.Les partis espèrent-ils réellement aujourd’hui se réapproprier nos luttes en isolant la dimension écologique alors qu’elles se sont construites de pratiques et de convictions indissociables : anticapitalistes, féministes, communalistes, « do it yourself » et bien d’autres ?


Aux Lentillères nous n’avons besoin ni de programme ni de promesse pour construire notre avenir.
    C’est pourquoi nous réaffirmons :
– Que notre pensée de l’écologie ne sera jamais séparée d’un processus collectif, de l’inclusion des plus précaires, et de la prise en compte de multiples questionnements sur les différentes formes d’oppression.
– Que la préservation des terres ne passe pas par leur mise sous cloche, mais par une mise en relation réfléchie de l’habitation, de l’agriculture et de la biodiversité. L’habitation fait partie intégrante de l’histoire, du présent et du futur du Quartier. Il doit rester habité, de manières multiples et réfléchies collectivement.
– Que seule l’élaboration collective entre les usager·es d’un territoire permet de prendre soin à la fois de la terre et de ses habitant·es. Nous refusons que le Quartier soit morcelé à travers des baux individuels. Nous ne sommes pas opposé·es par principe à toute forme de régularisation, à partir du moment où elle permettra de penser le Quartier comme une seule entité, dont les usages fonctionnent ensemble et s’enrichissent mutuellement.
–  Que nous voulons que cette possibilité concrète de soigner collectivement un territoire soit inscrite dans le PLUi à travers une forme nouvelle : la Zone d’Écologies Communales (ZEC). Cette  zone permettra de penser ensemble l’habitat, le travail de la terre, et la préservation des espaces, à travers des formes d’habitat léger, d’agriculture respectueuse et d’attention poussée aux non-humains. Le soin de cette zone sera confié à ses usager·es à travers des assemblées horizontales.


Il y a 10 ans le combat contre l’artificialisation des terres aux Lentillères et ailleurs peinait à trouver de l’écho. Parions que demain, celui que nous menons simultanément pour plus de solidarité et de communs, sera une évidence. L’écologie sera communale ou ne sera pas.

 
Par ailleurs, l’abandon du projet aux Lentillères ne saurait permettre aux décideurs de justifier la bétonnisation d’autres terres. Nous soutenons toutes les initiatives qui visent à empêcher la destruction des terres agricoles, nous vous invitons donc à nous rejoindre au sein de la coalition du Cri des Terres, pour se lier face aux logiques destructrices de la métropole dijonnaise.


Enfin, nous réaffirmons que nous soutenons toutes les formes de résistance qui arrachent la politique à la représentation et aux comptages des urnes pour en faire une matière vivante, faite de débat et de conflit, d’entraide et de solidarité, d’occupation de rue et de mise en grève.


 Nos solidarités seront notre force.
L’assemblée du Quartier libre des Lentillères

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Fête de printemps : EDITO et PROGRAMME

 

 
Le quartier libre des Lentillères est né d’une manifestation fourche en main en 2010, à Dijon, à l’issue de laquelle une centaine de personnes a défriché puis cultivé un première parcelle sur un ensemble de terres fertiles et de maisons abandonnées, menacées par un projet d‘urbanisation.
 
En 10 ans ce premier potager à grandi pour devenir quartier. D’années en année ce petit bout de campagne au cÅ“ur de la ville, derniers vestiges de l’ancienne ceinture verte de Dijon, s’est re-mué en lieu de maraîchage, d’habitation, d’auto-construction, de bouillonements sociaux et de fêtes fièvreuses, d’accueil d’exilés et d’engagements sur la ville. Du printemps 2010 au printemps 2020, face aux coups de tractopelles, de matraques, de karshers, aux fausses concertations publiques et aux faux-semblants de la vitrine verte municipale, les lentillères ont résisté.
 
Le 25 novembre dernier, la mairie annonçait -enfin – l’abandon de la phase 2 du projet de bétonisation de ces terres maraichères, tout en menaçant de tri et d’expulsion celles et ceux qui sont parvenus à les défendre. Le quartier libre doit donc continuer aujourd’hui à se battre pour maintenir ce qu’il a construit de singulier sur ce triangle de 9 hectares.
 
Dans cet espace aussi bio-diversifié qu’hétéroclite, on continue à croire en l’auto-gestion des communs par les habitant.e.s et usagers directs -et non par le marché où par les pouvoirs lointains et imposés. On y invente des manières de s’organiser collectivement en lien avec le reste du vivant.
 
Depuis l’occupation, chaque année, de grandes fêtes ont lieu pour l’arrivée du printemps et celle de l’automne. Cette année, la fête de printemps du quartier libre des Lentillères célèbre 10 années de lutte, une victoire partielle et un tas de désirs concrètement fous pour la suite ! La fête de printemps sera un aussi un moment de mobilisation pour affirmer à plein que l’avenir du quartier doit bel et bien être inventé par ces usager.e.s et que les menaces et projets parachutés doivent cesser.
 
 
Dès le week-end du 3 et 4 avril,les lentillères se déploieront dans d’autres parcs et quartiers de la ville pour discuter des initiatives de contestation des politiques urbaines actuelles, en s’appuyant, comme point de départ, sur l’expérience des Lentillères. Et d’en comprendre la signification profonde comme expression générale d’un mouvement de remise en cause de la politique représentative.
 
 
Du vendredi 10 avril au lundi 13 avril, tout le quartier se transforme pour accueillir des concerts, ateliers, spectacles, expositions, balades. Nous y retrouverons un tas de groupes et collectifs qui nous ont remué et mis en transe dans la dernière décennie. On espère y boire un coup aussi avec tous les ami.e.s qui ont accompagné cette histoire et modelé ce territoire, en y habitant un moment, en y cultivant un bout de jardin, en venant régulièrement se mêler au quartier depuis d’autres contrées…
 
 
Le Samedi 11 avril, la fête s’exporte en centre-ville le temps du « Carnaval sauvage des lentillères » déambulant dans les rues dijonnaises. Avec ses hakas, dérives, danses, masques, chars et ses passions d’exister, le carnaval nous projettera vers une nouvelle décennie de luttes pour perpétuer la défense du quartier libre.
 
 
Puisqu’il n’y a pas de bon carnaval sans bons déguisements, on vous invite à vous lancer dès maintenant : il y aura un cortège paysan avec ses traditionelles fourches et bêches, un bande de renard fauve et d’animaux des friches, et une cohorte de costumes végétaux et d‘êtres recyclés.
 
 
Il est possible de venir aider à la préparation des chars et costumes, ainsi qu’à l’installation de la fête pendant toute la semaine précédente.
 
 
Si vous venez d’ailleurs que dijon pour la semaine ou juste pour la fête et avez des besoins de couchage, prenez une tente et envoyez un petit mail à lenti10ans@riseup.net pour qu’on estime au mieux les besoins.
 
 
Que la fête dure et que la lutte continue !
 
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VENDREDI 10 AVRIL 2020 
    
– 17h00 : « Dixtorsion » Spectacle de danse collaborative, performance en mouvement
– 19h00 : Tout Bleu – nappes et transe incantatoire – (Genève)
– 20h30 : Cabaret d’anniversaire des Lentillères – retour en histoires, chansons, blagues, poésies sur 10 ans d’occupations du quartier.
– 22h00 : Hyperculte – Duo kraut-pop post-disco (Genève)
– 23h30 : Lovataraxxx – Cold Wave (Grenoble) 
– 01h00 : Badbad – Dark Techno Wave Dancefloor (Paris)
 
SAMEDI 11 AVRIL 
    
###  14h00 : Carnaval sauvage des lentillères (voir plus haut) – départ à 14h des lentillères. Tout le monde est là ! déguisé.e.s ! ###
 
 
– 19h00 : « Nous les oiseaux » par la compagnie Les Fugaces – Théâtre – Road trip pour un soulèvement poétique – Adaptation libe du roman de Lola Lafon « Nous sommes les oiseaux de la tempête qui s’annonce »
– 19h30 : Flo Mekouyenski – Petites Chansons Sauvages et autres facéties (synthétienne)
– 20h30 : Chafouin – Noise Rock Expressioniste – (Cévennes) 
– 21h45 : Avatch – Satires et bal de 12 (Aveyron) 
– 23h00 : Portron Portron Lopez – Rock sur ressorts (Aveyron / Limousin)
– 00h30 : Binamé – Transes collectives disco-punk et révolutionnaires depuis plus de 30 ans (Belgique)
– 01h30 : Plagiat – [t]rap in opposition (Le Mans) 
– 02h00 : Panaché de DJs : mixx d’un monde par une loutre, 13 dec crew (hiphop – dijon), dj saman (tutti frutti – dijon) , dj lo (musique à scotcher – marseille)
 
DIMANCHE 12 AVRIL
    
– 14h00 : Projet D, Part I spectacle de marionnettes 
– 15h30 : Atelier Rap des Lentillères 
– 16h00 : balade historique friche
– 16h30 : Projet D, Part II – spectacle de marionnettes
– 18h00 : « La Bonne Colère » – Cie La Stoccatathéâtre
– 19h00 : « Ni Gueux, Ni Maître », Théâtre forain déjanté et hommage à léon Tolstoï, Cie des Arracheurs de Dents – (rennes-creuse)
– 20h30 : Infecticide – Post-industriel-Synthpunk-electrowave-neo-dada calé-découpé (Paris) 
– 21h30 : Breizh Napoli – Bal en diagonale, tarentelle et fest-noz (Bretagnes / Napoli) 
– 23h00 : Bisous Mamie – Rock & Claviers (Chaôlon-Sur-Saône)
– 00h30 : Deux Boules Vanilles – Voodoo Dance & Drum Tunning Noize (Lyon)
– 1H30 :  Blada – Electro-trad maghreb et Moyen-Orient.
– 02h00 : Raymonde (live electro – lyon france) Souk6tem high-fi (nantes) et panaché de homes DJs tanneries et lentillères: dj ranium, dj seb potcole et dj lu
 
En continu de 14h00 à 18h00 : 
Cie La Méandre avec le spectacle en caravane « On boira toute l’eau du ciel »Â 
« Les lectures zelectroniques«  – Détachement International du Muerto Coco – Poésie contemporaine / théatre / musique
 
LUNDI 13 AVRIL 
 
– 15h00 : Balade historique Lentillères 
– 16h00 : The Magic Mitchell and Armandino afternoon show cartes transformistes et accordéon savant (wild west)
– 18h00 : Cie Qualité Street – Spectacle « La Beauté du Monde »
– 19h00 : lv2 – danse avec les loops (paris)
– 20h00 : Tôle Froide – lo-fi riot girl pop punk band  (lyon / Saint-Etienne) 
– 21h00 : Mauvaise surprise – transe hyp-no wave (Synthétienne) 
– 23h30 : Balladur – Synth-noise-dub-pop (Villeurbanne)
– 01h00 : Claustinto – Pop Underground (Lyon)
 
En continu dans l’après-midi de 14h00 à 18h00 : 
Cie La Méandre avec le spectacle en caravane « On boira toute l’eau du ciel ».
 
+ Lupus in Fabula par le Projet D et Bonhomme par la compagnie Raffut 
 
et aussi sur tout le week-end : une radio pirate belge, des expos, des éditions indépendantes, un coin boum permanente, un camping pour les personnes venues de plus loin….
 
Pour tous contacts : lenti10ans@riseup.net 
 

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[07/01] LES LENTILLERES ATTAQUE LE PLUI

Rassemblement devant Dijon Metropole, Avenue du Drapeau, le Vendredi 7 février 2020 à 14h.

Le 25 novembre 2019, au terme de presque 10 années de lutte de la part des usagèr.e.s  du Quartier Libre des Lentilleres et de leurs soutiens, le Maire annoncait l’abandon de la phase 2 du projet d’éco-quartier et interdisait l’urbanisation de ces précieuses terres maraîchères occupées.Le 19 décembre dernier, la métropole votait le nouveau PLUI-HD dans lequel le Quartier Libre des Lentillères reste pour l’instant classé comme Zone A Urbaniser (ZAU). Ceci laisse la possibilité d’un retour en arrière. Rien ne garantit qu’un nouveau projet de bétonisation ne soit, un jour, relancé.

Dijon-Métropole se vante de participer à la préservation des terres agricoles et d’espaces « hybrides » (ni ville, ni campagne). Mais comment pourrait-on croire en ces déclarations d’intentions et confier l’avenir de ces terres à une municipalité qui les a menacées pendant 10 années et menace toujours d’en urbaniser d’autres en périphérie de la ville ? Si ce site de biodiversité et de pratiques d’écologies sociales existe encore aujourd’hui c’est parce que le Quartier Libre des Lentillères a su le préserver, en prendre soin et le défendre contre les logiques d’aménagement.Nous y avons réinventé de nouvelles formes d’habiter la ville, et d’y cultiver les terres avec toujours le souci de préserver un lien étroit avec notre environnement. Le PLUI tel qu’il est actuellement rédigé n’intègre pas cet existant.De plus, aucune forme actuelle du PLUI ne reconnait l’entremêlement des usages qui caractérise désormais ce territoire : jardinage et maraîchage, activités culturelles et sociales, habitat, réserve de biodiversité,…

Pour ces deux raisons nous déposons un recours à l’encontre du document de planification auprès du Tribunal Administratif de Dijon le vendredi 7 février. Cette hétérogénéité d’usages reliés pourrait se voir mise en danger demain par un zonage uniformisant.
Nous exigeons donc que les menaces sur ces terres et ses usagèr.e.s soient formellement levées, c’est à dire

  • d’acter l’abandon de la phase 2 du projet d’éco-quartier, 
  • de déclasser le zonage attribué à ce Quartier, 
  • de prendre en considération l’existant qui s’invente et se construit quotidiennement depuis 10 ans sur ce territoire auquel sont lié.es de nombreux.ses dijonnais.e.s. 

Pour préserver les usages et les formes d’organisation collective propres au Quartier Libre des Lentillères, le droit doit se réinventer afin d’être à la hauteur des enjeux de notre époque. 

Nous nous inscrivons dans un mouvement plus large qui propose d’autres manières d’habiter les territoires.

Parallèlement au dépôt de ce recours nous travaillons à l’élaboration d’une nouvelle proposition dont nous soumettrons les grandes lignes lors du rassemblement qui nous mènera devant le tribunal administratif.

Rassemblement devant Dijon Metropole, Avenue du Drapeau, le Vendredi 7 février 2020 à 14h.

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Tribune – Il faut laisser vivre le Quartier libre des Lentillères à Dijon !

Après le récent abandon par la mairie de Dijon du projet d’artificialisation des terres du quartier libre des Lentillères, 150 auteur.es, chercheur.euse.s, réalisateur.trice.s, architectes, comédien.ne.s énoncent les raisons de leur opposition aux menaces de normalisation de cet espace d’expérimentation.

Depuis une certaine attention aux enjeux écologiques, sociaux et démocratiques, nous sommes impliqués dans la préservation et la construction des (biens) communs, et en cela solidaires de la lutte du Quartier Libre des Lentillères. Nous nous réjouissons en ce sens de la récente décision municipale d’abandonner la phase 2 du projet d’éco-quartier qui menaçait d’urbaniser les dernières grandes parcelles de terres nourricières à l’intérieur de la ville de Dijon. Mais nous saluons surtout la ténacité et l’inventivité des militant·es et habitant·es impliqué·es dans cette lutte pour avoir, depuis dix ans, pris soin de ces 9 ha délaissés à leur arrivée. Elles et ils se sont attaché·es à les remettre en culture tout en y préservant la diversité de la flore et de la faune, y compris en prenant soin de maintenir certains espaces non jardinés. Elles et ils y ont aussi fait revivre un quartier en auto-gestion, solidaire des mouvements sociaux émancipateurs et des exilé·es, ouvert sur le reste de la ville et bien au-delà. Elles et ils y ont développé de multiples initiatives, maraîchères, festives, culturelles, des liens tenaces et la réappropriation de savoirs et de savoir-faire….Nous aimons la détermination bâtisseuse qui a permis la restauration des bâtis anciens, l’expérimentation d’auto-constructions de terre et de pailles ou encore l’apparition d’un amphithéâtre ou d’un bateau pirate… 10 ans d’un certains bouillonnement joyeux en ont fait un lieu de maraîchage, de vie mais aussi de flâneries fantasques fort apprécié de bien des dijonnais·es.

L’abandon du projet d’urbanisme, première victoire offerte par l’occupation sans droit ni titre du quartier, n’est pas seulement la victoire pour la préservation d’un « espace vert Â». C’est la victoire d’une certaine idée de la ville et de la façon de l’habiter. C’est la victoire d’une certaine vision de l’écologie politique, non inféodée aux impératifs de l’industrialisation et de la métropolisation. Comme cela a déjà été le cas l’an dernier avec l’abandon du projet d’aéroport sur le bocage de Notre-Dame-des-Landes, c’est la victoire d’une alliance vertueuse entre lutte acharnée et expérimentation concrète.

Nous laissons à M. Rebsmanen, maire de Dijon, le soin d’écrire sa propre version de l’histoire, en affirmant « Je n’avais rien dit car je ne voulais pas faire plaisir aux anar, mais je l’avais prévu depuis le début Â». L’histoire sociale nous a appris qu’il n’est pas d’acquis sur le plan démocratique, social ou écologique sans mobilisations collectives. Ici comme dans de nombreux autres endroits, les populations doivent lutter contre la surdité des élites, les caprices de certains élus et les processus d’invisibilisation de celles et ceux qui font véritablement vivre un territoire.

Sortir des pensées verticales, défendre l’art d’habiter des lieux

Alors que la municipalité avait décidé de ne rien changer dans la révision du « Plan Local d’Urbanisme Intercommunal Habitat et Déplacements Â» (PLUI-HD) concernant la phase 2 de l’éco-cité « jardin des maraîchers Â» – notons au passage, le processus marketing pervers qui consiste à se servir des attributs positifs d’un passé que l’on a contribué à faire disparaître – et qu’elle répondait par la négative aux demandes d’abandon exprimées lors de l’enquête publique, le Maire de Dijon est revenu in-extremis sur cette position. Il a ainsi validé dans une déclaration à la presse une partie de ce que demandait depuis 10 ans le collectif des Lentillères. Cette volte-face nous invite à exercer notre esprit critique et à rester dubitatif vis-à-vis des arguments, économiques et juridiques notamment, mobilisés pour justifier une possible expulsion des habitant·es du quartier dans les mois à venir. Nous déplorons en effet qu’en même temps qu’il reconnaît la justesse de leur combat, donnant raison à 10 ans de combat et d’enracinement, le maire de Dijon affirme qu’il pourrait dorénavant évacuer par la force les militant·es et les habitant·es qui ont fait renaître et vivre ce quartier.

Refuser de reconnaître que la chose publique peut aussi se construire en dehors des cases trop étroites des politiques publiques et de leur encadrement réglementaire, c’est oublier que la vitalité et la résilience de la démocratie ne se réduit pas à la sphère de la représentation ni même à celle de la participation encadrée. L’existence du Quartier est une singularité précieuse qui attire de nombreu·ses sympathisant·es, curieu·ses, qui répond à de multiples aspirations locales et inspire des regards venus d’ailleurs.

Le Quartier libre des Lentillères doit continuer d’exister car il est l’antithèse de grands projets inutiles et imposés, à l’image de la nouvelle stratégie agro-alimentaire de Dijon Métropole baptisée « Système alimentaire durable de 2030 Â». Imaginée pour répondre à l’Appel à manifestation d’intérêt « Territoires d’Innovation – Grande Ambition Â» (TIGA) lancé par l’État. La métropole y voit en toute modestie «  un projet original qui la place parmi les références françaises en matière d’agroécologie Â». En fait de référence agroécologique, ce projet est surtout l’occasion pour plusieurs poids-lourds de l’agro-alimentaire qui en sont partenaires, de construire une nouvelle filière économique particulièrement lucrative. Dijon Céréale, Seb, Orange,… mais aussi des réseaux comme le Food Use Tech ou Vitagora pourront ainsi continuer à entretenir leur position dominante en toute tranquillité au prétexte d’assurer une soi-disante « autonomie alimentaire Â» aux habitants. Mais nous n’avons aucunement besoin d’un TIGA et de ses acteurs dominants pour reprendre le contrôle de notre alimentation, pour prendre soin de la terre, pour accompagner le retour des paysans et partager nos ressources. Comme de nombreuses autres alternatives territoriales, le Quartier libre des Lentillères démontre qu’il est possible de s’inscrire hors d’une verticalité vertigineuse du pouvoir pour privilégier la gestion collective des biens communs, que sont en premier lieu les sols nourriciers et la biodiversité. Il offre la possibilité de concevoir de nouvelles formes d’interaction avec le vivant, y compris à partir de l’espace urbain.

Contre les menaces de« normalisation Â», soutenir les expérimentations collectives

Que le maire s’efforce de détruire demain 10 années de constructions collectives sur le quartier des Lentillères sous les auspices de la république comme le gouvernement a cherché l’an dernier à se venger de son renoncement sur la ZAD de Notre-dame-des-Landes ne serait pas seulement une nouvelle démonstration de la violence d’État. Ce serait déclarer de nouveau la guerre à tout un mouvement émergeant et hétérogène, puissant et créatif, qui a décidé de reprendre la main face à l’impuissance politique et au diktat économique. Vouloir Â« normaliser la zone Â», et tenter de faire rentrer dans un zonage unique ce quartier où se mêlent des expériences maraîchères, écologiques, d’échanges non marchands, d’auto-gestion et de solidarité, reviendrait à se priver de savoirs et savoir-faire riches au moment même où la crise climatique, écologique et sociale nous invite à changer radicalement de modèle et à explorer de nouvelles voies.

Nous demandons en conséquence que l’avenir du Quartier libre Lentillères soit confié aux habitant·es et militant·es qui l’ont construit. Nous appelons les responsables politiques à faire preuve de courage, d’imagination juridique et d’ouverture aux attentes de leurs administré·es en reconnaissant aux habitant·es le droit d’habiter les lieux où ils et elles vivent et qu’ils et elles font vivre. Nous leur demandons de se mettre au diapason des règles d’usages imbriqués que ceux-ci parviennent à élaborer au quotidien. Nous affirmons notre solidarité active pour ce nouveau grand chantier de réflexion collective qui s’ouvre sur l’avenir du Quartier libre des Lentillères.

Ici la tribune (version courte) parue dans Libération

Premier.e.s signataires de l’appel des Lentillères

Yannick Sencébé, sociologue, Dijon
François Jarrige, Historien, Université de Bourgogne, Dijon
Léo Coutellec, Philosophe des sciences, Paris
Antoine Lagneau, enseignant vacataire
Alice Le Roy, journaliste et enseignante
Adrien Normand, Chimiste Université de Bourgogne-CNRS, Dijon
Jean-Louis Tornatore, Anthropologue, Université de Bourgogne, Dijon
Sarah Vanuxem, juriste, Université de Nice, Nice
Josep Rafanell i Orra, philosophe et psychothérapeute, Paris
Isabelle Stengers, philosophe, Bruxelles
Serge Gutwirth, juriste, Belgique
Barbara Glowczewski, anthropologue, CNRS
Johan Badour , édition Divergences
Marie Menant, architecte et doctorante, Belgique
Serge Quadruppani, écrivain, traducteur
Jérôme Baschet, historien
Rémy Toulouse, édition La découverte
Jean Rochard, producteur de musique
Nicolas Flesch, auteur-acteur.
Chloé Kazemzadegan, travailleuse du spectacle
Pascal Bernier comédien
Yves Pagès, écrivain & éditeur (Verticales)
Simon Le Roulley, sociologue
Sophie Gosselin, philosophe, revue Terrestres
David gé Bartoli, philosophe
Fabrice Flipo, philosophe, Paris
Alessandro Pignocchi, auteur de bande dessinée
Philippe Descola, anthropologue
Alain Damasio, romancier
Fanny Ehl, doctorante designer
Sylvaine Bulle, sociologue
Elsa Brès, artiste
Mathilde Girard, psychanalyste philosophe, Paris
Laura Mehtali , doctorante en géographie, Nantes
Christophe Laurens, architecte
Anne de Galzain, réalisatrice, 02 Château-Thierry
Gilles Clément, paysagiste, Paris
Patrick Bouchain, architecte, Paris
Jean-Philippe Pierron, philosophe, Dijon
Nastassja Martin, anthropologue
Bruno Latour, sociologue
Christine Thépénier, orga Bobines Rebelles dans les Alpes, 05110 Esparron
Dominique Bourg, philosophe, Lausanne
Miguel Benasayag, philosophe et psychanalyste, Paris
Vincent Bourdeau, Enseignant-Chercheur en philosophie, Université de Besançon, Besançon
Caroline Darroux, ethnologue, MPOB, Anost
Noël Barbe, anthropologue , IIAC
Flavie Ailhaud, ethnologue
Noé le Blanc, enseignant
Stéphane Gacon, Historien, Université de Bourgogne, Dijon
Christophe Bonneuil, historien, Cnrs
Nathalie Quintane, autrice
Corinne Morel Darleux, autrice
Jeanne Susin, musicienne
Alessandro Stella historien (CNRS-EHESS)
François Thoreau, sociologue, université de Liège
Francesco Pastacaldi, musicien
Luisa Homem, cinéaste
Aki Kaurismäki, cinéaste, Finland
Félix Rehm, cinéaste et monteur, Paris
François Olislaeger, auteur de BD
Amandine Guilbert et Rémi Eliçabe, les éditions des mondes à faire
Guillaume Faburel, Géographe, Lyon
Vincent Balland, doctorant en histoire, Dijon
Hélène Tordjman, économiste, Paris
Fabian Lévêque, doctorant en études urbaines, Lyon 2
Sonja Kellenberger, Sociologue, Dijon
Pierre Bitoun, sociologue, co-auteur du livre « Le sacrifice des paysans »
Fanny Chrétien, Enseignante chercheure en Sciences de l’éducation et de la formation, Dijon
Thomas Bouchet, Historien, université de Lausanne
Lucie Dupré, anthropologue, INRA
Aurélie Dumain, sociologue, CMW, Lyon.
Cécile Gazo, doctorante en sociologie, Toulouse
Damien Marage, géographe, Dijon
Jeremy Sauvineau, doctorant en sociologie, Dijon
Béatrice Dégrange, chargée d’ingénierie de formation, AgroSup Dijon
Claire Masson, sciences de l’éducation, Dijon
Alexis Zimmer, historien, CNRS-EHESS
Jean Baptiste Vidalou, auteur
Maële Giard, géographe, Lyon
Mathilde Girault, études urbaines, Monts du Lyonnais
Elie Rivière, ingénieur et éco-habitant, Monts du Lyonnais
Mathilde Grandjean, doctorante en droit public, Dijon
Dominique Guidoni-Stoltz, Enseignante chercheure en Sciences de l’éducation et de la formation, Dijon
Kaduna-Eve Demailly, géographe (MCF), Paris
Jérôme Boissonade, maitre de conférences (sociologie)enseignements, université du littoral côte d’opale (ulco)
Élisabeth Peyroux, géographe chargée de recherche (cr1)
Flaminia Paddeu, géographe, Paris 13
Tibo Labat, Artiste-architecte, Nantes
Chloé Merlin, docteur en Écologie Microbienne
Romain Ozanne
Pierre Carniaux, réalisateur, Paris
Olivier Cheval, critique, cinéaste
Lorraine Druon, artiste
Peggy Cenac, Mathématicienne, Université de Bourgogne, Dijon
Gaëlle Boucand, cinéaste
Lucie Lerbet, doctorante, Lyon
Viviana Méndez Moya, artiste plasticienne
Mario Brenta, cinéaste/enseignant Université de Padoue
Raphaël Nieuwjaer, critique de cinéma
Gerard Watkins auteur acteur metteur en scène
Jonas Cervantes, diplômé d’architecture, Nantes
Daniel Kupferstein, réalisateur.
Maxime Martinot, réalisateur
Valérie Osouf, documentariste
Maximiliano de la Puente, rechercher et réalisateur
Alain Raoust, Cinéaste, professeur associé université Paris 8 Vincennes à Saint-Denis
Raquel Schefer, chercheuse et réalisatrice
Jacopo Rasmi, chercheur et enseignant
Louise Chennevière, ecrivaine
David-Marie Vailhé, urbaniste
Sophie Wahnich, historienne, CNRS, Paris
Valerie Massadian, cineaste
Antoine Granier, vidéaste, cinéaste
Lorenzo Bianchi, réalisateur, producteur, Paris
Gaëlle Obiégly, écrivaine
Catherine Libert, cinéaste, Paris
Boris Nicot realisateur
Jean Pierre Duret, ingénieur du son, réalisateur documentaire
Léa Gasquet, journaliste, Paris
Yves Citton, enseignant de littérature, Université Paris 8
Mathias Rollot, enseignant-chercheur en architecture
Thierry Paquot, Philosophe
Jean Baptiste Bahers, Chargé de recherche CNRS, Université de Nantes
Geneviève Azam, économiste
Laura Mehtali, doctorante en sociologie
Claire Mélot, architecte, doctorante en philosophie
Jules Valeur, ingénieur du son
Franssou Prenant cinéaste
Alice de Lencquesaing, comédienne, Paris
Clément Schneider, cinéaste
Fabien Bidaut, artiste, architecte
Camille Degeye, réalisatrice, Paris
Jean-Robert Viallet, journaliste, auteur, cinéaste
Philippe Corcuff, maître de conférences de science politique à Sciences Po Lyon
François Nobécourt, directeur de la photographie, Mexico
Caroline Dubois, écrivain
Thomas Le Gouge, philosophe, historien de l’art, Paris
Charlotte Thevenet, enseignante, chercheuse, Paris
Juliette Bayer-Broc, programmatrice, cinéaste, Marseille
Aurélien Gabriel Cohen, doctorant en philosophie et géographie, Université Paris 7 / MNHN
Luc Chessel, critique de cinéma et acteur
Frédéric Neyrat, philosophe
Martine Markovits, programmatrice, Paris
Paul Citron, urbaniste
Yaël André, cinéaste
Clémentine Roy, artiste
Sophie Bruneau, cinéaste
Maxime Combes, économiste
Emilie Hache, philosophe, Université Paris Nanterre
David Graeber, anthropologue, London School of Economics and Political Science
Yannick Haenel, écrivain
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Pour les voeux, les Lentillères devancent Rebsamen !

Vendredi soir, François Rebsamen annonçait ses vœux au Zénith à près de 2000 dijonnais·e·s venu·e·s assister à la grand messe de l’année, qui prend tout son sens dans un contexte électoral. Les Lentillères ont devancé son annonce, envoyant une petite délégation, débarrassée de ses bottes et vêtue de ses plus jolies escarpins pour l’occasion, qui a accueilli elle-même tou·te·s ces dijonnais·e·s à l’intérieur du zénith avec un message de bonne année et un petit papier (glacé pour l’occasion).

Le recto…

… et le verso

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